Jos D’Haese (PTB-PVDA), l’homme qui a fait trembler Bart De Wever à Anvers, veut devenir bourgmestre,…
Le jeune chef de file du PTB en Flandre a classé son parti à la deuxième position dans le canton d’Anvers, à moins de 3 % de la N-VA du bourgmestre Bart De Wever.
Son prochain objectif est clair : lui chiper l’écharpe de bourgmestre. (« Le Soir »)
Portrait – Journaliste au pôle « Pouvoirs » Par Alexandre Noppe Publié le 21/06/2024
Quand on se présente au lieu de rendez-vous fixé avec Jos D’Haese, pas loin du parlement flamand, il est au téléphone. Le longiligne chef de file du PTB (dites PVDA) en Flandre doit d’ailleurs une bonne part de sa réélection triomphale au parlement à son téléphone, justement. Suivi par plus de 175.000 personnes sur TikTok et 107.000 sur Instagram, les médias flamands n’hésitent pas à présenter l’Anversois comme « le politicien le plus populaire chez les jeunes ».
Petit à petit, il s’est construit via les réseaux sociaux une certaine notoriété au nord du pays. Un succès en ligne que Jos D’Haese doit à une approche différente des autres politiciens, d’après lui. « J’utilise les réseaux sociaux pour y parler de politique, faire du contenu. Contrairement à d’autres, je respecte les jeunes et je ne vois pas le besoin de me déguiser ou de faire des danses pour attirer leur attention », explique le député de 31 ans. « C’est en abordant en ligne des thématiques qui leur parlent, en ouvrant grand les oreilles à ce qui préoccupe la jeunesse, que nous pouvons les représenter dignement au parlement. ».
Un engagement familial
Pour D’Haese, la politique et le PTB sont une affaire de longue date. Il est « tombé dedans quand il était petit », sa maman étant médecin à la « médecine pour le peuple » et active au sein du parti marxiste depuis de longues années. Elle est membre du conseil de district à Hoboken, en périphérie anversoise, depuis déjà 24 ans, comme représentante du PVDA.
Présent à des manifestations en tout genre durant son enfance, c’est lors de ses études universitaires que Jos D’Haese s’engage plus concrètement au sein des troupes du PTB. Comme beaucoup, ce sera par le biais du Comac, mouvement étudiant lié au parti, qu’il va entrer en politique. Et dès la fin de ses études de biologie, le même cursus qu’un certain Raoul Hedebouw, il devient rapidement politicien à temps plein.
Un membre du parti du travail qui n’a donc jamais vraiment travaillé ? « J’ai eu quelques petits jobs durant et après mes études, mais c’est vrai que je suis entré très jeune au parlement. Il y a deux manières d’analyser cela. D’une part, c’est un handicap d’avoir acquis peu d’expérience dans la vraie vie avant la politique. Mais d’autre part, on peut difficilement vouloir des jeunes parlementaires et leur demander dans le même temps d’avoir travaillé 20 ans avant », résonne D’Haese. « Je pense que le plus important est d’avoir un équilibre au sein du groupe politique, ce que nous avons », justifie-t-il.
Un groupe politique qui sera d’ailleurs désormais bien fourni, à la suite du succès du PVDA obtenu aux dernières élections. Avec 8,3 % des voix, soit le même score que l’Open VLD, le parti a gagné trois points de pourcentage en Flandre. Surtout, son groupe va passer de quatre à neuf députés, devenant un groupe politique reconnu au parlement flamand. « Sous la législature précédente, nous devions parfois choisir entre différentes thématiques car nous n’étions pas assez nombreux. Cela ne sera plus le cas, et en plus nous aurons maintenant le droit de vote en commission, c’est un vrai changement », se réjouit celui qui restera chef de groupe au parlement.
Futur bourgmestre d’Anvers ?
Avec, il le promet déjà, une opposition « bruyante » au prochain gouvernement mené par la N-VA. « Je suis heureux de voir que le bloc de gauche a gagné les élections en Flandre. Nous aurons davantage de députés de gauche que sous la législature précédente. Mais je vois que Vooruit abandonne déjà son point de rupture, la gratuité des repas scolaires pour chaque enfant, deux jours après la fin de la campagne. Et puis, Vooruit ou pas dans le gouvernement, la N-VA restera en charge, donc je m’attends à une nouvelle vague de politiques de droite, que nous combattrons », prévient-il. « Vooruit gouverne déjà avec la N-VA à Anvers, et ça ne donne certainement pas une politique de gauche. Cela donne de la droite », regrette celui qui est également élu local dans un district anversois depuis 2018.
A propos d’Anvers, justement, le score de Jos D’Haese en a surpris plus d’un. Avec 66.384 voix de préférence pour le scrutin régional, le chef de file du PVDA se classe troisième dans la plus grande province de Flandre, derrière Tom Van Grieken et Jan Jambon, rien de moins que le président du Vlaams Belang et le ministre-président flamand sortant. Et au niveau du canton électoral d’Anvers, qui comprend l’ensemble de la commune et celle voisine de Zwijndrecht, Jos D’Haese y obtient tout simplement le premier score tous partis confondus. Son parti s’y place deuxième, avec 22,5 % des votes, s’approchant fortement de la N-VA (25,5 %). Derrière, le Vlaams Belang suit de loin avec 16,2 %.
De quoi rêver d’un score historique dans la place forte du nationalisme flamand en octobre, aux élections communales ? « Deuxième dans la ville de Bart De Wever, même moi je ne l’avais pas vu venir », confie Jos D’Haese.
« Je sentais sur le terrain que les habitants nous accueillaient positivement et se montraient reconnaissants de notre présence sur le terrain au quotidien. » Il a annoncé ce lundi qu’il se présentera comme candidat bourgmestre en octobre 2024. Il mènera campagne à fondi, pour déjouer les pronostics, et rééditer son exploit de juin. « Nous mènerons une campagne pour la victoire, pas pour des seconds rôles. Après douze ans de N-VA à la tête de la ville, on sent qu’il est temps pour une autre dynamique. Dans mon district de Borgerhout, où nous sommes en majorité avec Groen et Vooruit (c’est le seul endroit en Belgique où le PTB dirige, avec la commune de Zelzate, NDLR), les gens sont heureux de notre politique de rupture. »
« Machine Gun Jos »
Celui qui se définit comme « un marxiste du XXIe siècle », sait aussi que le score de son parti à Anvers a empêché le Vlaams Belang d’obtenir une majorité avec la N-VA. Le Standaard l’a d’ailleurs présenté comme « celui qui a sauvé la peau de Bart De Wever », rendant tout débat sur la fin du cordon sanitaire stérile en empêchant leur majorité à deux. « Ce dont je suis heureux, c’est d’avoir récupéré des électeurs à l’extrême droite. Grâce à nous, une coalition avec le Vlaams Belang est impossible et j’en suis super soulagé. »
À 31 ans, Jos D’Haese entame donc sa deuxième législature au pouvoir. Il était entré au parlement en 2019, à seulement 26 ans. « Quand je suis arrivé, tout le monde a été marqué par mon débit de parole. Je parle en néerlandais avec le tempo d’un francophone. Les libéraux m’avaient même surnommé “Machine Gun Jos” », se souvient-il.
« Je serai politiquement actif toute ma vie », envisage-t-il déjà. « Mais ce ne sera pas forcément toujours dans un parlement. Je faisais partie d’un renouvellement des élus il y a cinq ans, et je serai heureux de laisser le parlement se rajeunir aussi quand j’aurai fait mon temps. » Puis, comme le disent de nombreux députés du PTB, « le pouvoir ne se situe de toute façon pas au parlement. Notre travail sur le terrain et nos actions dans la rue comptent tout autant », conclut-il. Quelques minutes après notre rendez-vous, Jos D’Haese vient de poster une vidéo sur TikTok, où il débat contre Filip Dewinter, figure du Belang à Anvers. Sa vidéo compte déjà des centaines de likes, des dizaines de commentaires et des milliers de vues. La campagne continue.
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