17 November, 2023 15:22

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—– Original Message —–
From: Michel Collon
Sent: Saturday, June 05, 2004

6 juin 44 : ce qu’on ne vous dira pas demain

Pourquoi Ford, GM et Esso ont-elles armé Hitler ?
MICHEL COLLON

« Oui, mais quand même les Américains nous ont ont libérés en 45 ! ».

Combien de fois, l’ai-je entendue celle-là! Sur les bancs de l’école. Mais aussi lors de débats sur les guerres actuelles des USA.

40-45, la seule ‘bonne’ guerre US ? Peut-être à nuancer. Quelques faits troublants sont documentés dans un excellent livre de l’historien Jacques Pauwels (1).

Ses documents irréfutables prouvent qu’une grande partie des sociétés US ont carrément collaboré avec Hitler, et pas seulement au début de la guerre :

Du Pont, Union Carbide, Westinghouse, General Electric, Goodrich, Singer, Kodak, ITT, JP Morgan…

Pire. La grande nouveauté stratégique d’Hitler, ce fut la « Blitzkrieg », la guerre-éclair :
porter très vite ses troupes au coeur de l’adversaire. Pour cela, deux conditions indispensables : des camions et de l’essence.

L’Allemagne n’ayant aucun des deux, c’est Esso qui a fourni l’essence, tandis que les camions provenaient des usines allemandes de Ford et General Motors.

« Que cette guerre dure le plus longtemps possible! »

Pauwels montre que :

1. Une grande partie du patronat US était pro-Hitler dans les années 30 et 40.

2. Cela n’a changé qu’au moment où les ventes des firmes US furent mises en danger par l’agressivité commerciale allemande en Amérique latine et ailleurs. Et par les occupations japonaises qui confisquaient tout le commerce en Asie.

En fait, les États-Unis jouaient double jeu. Ils souhaitaient que la guerre dure longtemps. Pourquoi ?

D’un côté, les énormes profits que leurs sociétés réalisaient en Allemagne étaient en croissance. De l’autre côté, ils s’enrichissaient en prêtant à la Grande-Bretagne qui supportait tout le poids financier de la guerre. Washington posait d’ailleurs comme condition que Londres abandonne ses colonies après la guerre. Ce qui fut fait. Les États-Unis ont réussi à profiter de la Deuxième Guerre mondiale pour affaiblir leurs rivaux et devenir la seule superpuissance capitaliste.

Henry Ford : « Ni les Alliés, ni l’Axe ne devraient gagner la guerre. Les USA devraient fournir aux deux camps les moyens de continuer à se battre jusqu’à ce que tous deux s’effondrent. »

Le futur président Harry Truman, 1941 : « Si l’Allemagne gagne, nous devons aider la Russie et si la Russie gagne, nous devons aider l’Allemagne, afin qu’il en meure le maximum de chaque côté. »

Ce jeu cynique ne cessa que lorsque l’URSS vainquit Hitler. Alors seulement, les États-Unis se précipitèrent pour sauver leurs intérêts en Europe.

Demain 6 juin, on fera comme si la guerre avait été gagnée en Normandie et non à Stalingrad. On ne dira pas qu’Hitler perdit 90% de ses soldats à l’Est. Que pour un soldat US tué, il y en eut 53 soviétiques. Les manuels scolaires sont parfois bizarres, non ?

Voilà, désolé de vous avoir ôté une de vos dernières illusions. Demain, 6 juin, vous pourrez penser à tout ça lorsque sur une plage normande, on fêtera George Bush, alors que son grand-père a financé Hitler. Dans quel monde vivons-nous ?

MICHEL COLLON

(1). Paru en néerlandais sous le titre Le mythe de la bonne guerre (l’Amérique et la Deuxième Guerre mondiale), EPO 2000.
ForumCommuniste@yahoogroupes.fr
Sent: Sunday, June 06, 2004
Subject: MRAP : 6 juin 1944 : Justice et reconnaissance pour tous les libérateurs de la France

Permettez-moi une précision: le 6 juin 44 n’a pas conduit à la Libération. La libération de la Corse, toujours française à ce qu’il semble, a commencé le 9 septembre 1943.
Elle fut l’oeuvre des résistants corses, pour la plupart communistes, aidés ensuite, par les tabors marocains dont un monument (au col « des goumiers » ou de « Teghime ») témoigne de l’héroïsme
Le débarquement du 6 juin 44 pour héroïque qu’il ait été, a permis l’achèvement de ce qui avait été commencé en Corse: la libération totale du pays.
PS: Enfin, au milieu des larmes de reconnaissance pour les morts américains venus libérer la France, une petite comparaison chiffrée: la seconde guerre mondiale a fait 300 000 morts américains au total (compris bien sûr ceux qui sont morts dans le Pacifique pour y défendre leur empire colonial). Comme il est interdit de parler des 21 millions de morts soviétiques, nous n’en parlerons pas.
Il y a eu 610 000 morts français, alors que la France avait en 1939 42 millions d’habitants, les USA 131. Sur ceux-là, 250 000 militaires, 360 000 civils. Ce sont des chiffres qu’on trouve partout. En revanche, on ne trouvera pas combien de civils ont été tués par les bombardements anglo-saxons.

Il semble qu’à l’époque où l’Air Force rasait nos villes pendant que la Wehrmacht brûlait nos villages, il y avait au moins entre-elles une alliance objective.

6 juin : commémoration ou mystification ?
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Par leur accumulation et par leur caractère unilatéral, les commémorations du soixantième anniversaire du Débarquement sont en train d’installer, dans la conscience collective des jeunes
générations, une vision mythique, mais largement inexacte, concernant le rôle des Etats-Unis dans la victoire sur l’Allemagne nazie. L’image véhiculée par les innombrables reportages, interviews d’anciens combattants américains, films et documentaires sur le 6 juin, est celle
d’un tournant décisif de la guerre. Or, tous les historiens vous le diront :

le Reich n’a pas été vaincu sur les plages de Normandie mais bien dans les plaines de Russie.

Rappelons les faits et, surtout, les chiffres.

Quand les Américains et les Britanniques débarquent sur le continent, ils se trouvent face à 56 divisions allemandes, disséminées en France, en Belgique et aux Pays Bas.

Au même moment, les soviétiques affrontent 193 divisions, sur un front qui s’étend de la Baltique aux Balkans.

La veille du 6 juin, un tiers des soldats survivants de la Wehrmacht ont déjà enduré une blessure au combat. 11% ont été blessés deux fois ou plus. Ces éclopés constituent, aux côtés des contingents de gamins et de soldats très âgés, l’essentiel des troupes cantonnées dans les
bunkers du mur de l’Atlantique.

Les troupes fraîches, équipées des meilleurs blindés, de l’artillerie lourde et des restes de la
Luftwaffe, se battent en Ukraine et en Biélorussie. Au plus fort de l’offensive en France et au Benelux, les Américains aligneront 94 divisions, les Britanniques 31, les Français 14. Pendant ce temps, ce sont 491 divisions soviétiques qui sont engagées à l’Est.

Mais surtout, au moment du débarquement allié en Normandie, l’Allemagne est déjà virtuellement vaincue.
Sur 3,25 millions de soldats allemands tués ou disparus durant la guerre, 2 millions sont tombés entre juin 1941 (invasion de l’URSS) et le débarquement de juin 1944. Moins de 100.000 étaient tombés avant juin 41. Et sur les 1,2 millions de pertes allemandes après le 6 juin 44, les deux tiers se font encore sur le front de l’Est.
La seule bataille de Stalingrad a éliminé (destruction ou capture) deux fois plus de divisions allemandes que l’ensemble des opérations menées à l’Ouest entre le débarquement et la capitulation.

Au total, 85% des pertes militaires allemandes de la deuxième guerre mondiale sont dues à l’Armée Rouge (il en va différemment des pertes civiles allemandes : celles-ci sont, d’abord, le fait des exterminations opérées par les nazis eux-mêmes et, ensuite, le résultat des bombardements massifs de cibles civiles par la RAF et l’USAF).

Le prix payé par les différentes nations est à l’avenant. Dans cette guerre, les États-Unis ont perdu 400.000 soldats, marins et aviateurs et quelques 6.000 civils (essentiellement des hommes de la marine marchande). Les Soviétiques quant à eux ont subi, selon les sources, 9 à 12 millions de pertes militaires et entre 17 et 20 millions de pertes civiles. On a calculé que 80% des hommes russes nés en 1923 n’ont pas survécu à la Deuxième Guerre Mondiale. De même, les pertes chinoises dans la lutte contre le Japon — qui se chiffrent en millions – sont infiniment plus élevées — et infiniment moins connues — que les pertes américaines.

Ces macabres statistiques n’enlèvent bien évidemment rien au mérite individuel de chacun des soldats américains qui se sont battus sur les plages de Omaha Beach, sur les ponts de Hollande ou dans les forêts des Ardennes. Chaque GI de la Deuxième guerre mondiale mérite autant notre
estime et notre admiration que chaque soldat russe, britannique, français, belge, yougoslave ou chinois.
Par contre, s’agissant non plus des individus mais des nations, la contribution des États-Unis à la
victoire sur le nazisme est largement inférieure à celle que voudrait faire croire la mythologie du Jour J. Ce mythe, inculqué aux générations précédentes par la formidable machine de propagande que constituait l’industrie cinématographique américaine, se trouve revitalisée aujourd’hui, avec la complicité des gouvernements et des médias européens. Au moment ou l’US-Army s’embourbe dans le Vietnam irakien, on aura du mal à nous faire croire que ce serait le fait du hasard…

Alors, bien que désormais les cours d’histoire de nos élèves se réduisent à l’acquisition de « compétences transversales », il serait peut-être bon, pour une fois, de leur faire « bêtement » mémoriser ces quelques savoirs élémentaires concernant la deuxième guerre mondiale :

– C’est devant Moscou, durant l’hiver 41-42, que l’armée hitlérienne a été arrêtée pour la première fois.

– C’est à Stalingrad, durant l’hiver 42-43, qu’elle a subi sa plus lourde défaite historique.

– C’est à Koursk, en juillet 43, que le noyau dur de sa puissance de feu – les divisions de Panzers — a été définitivement brisé (500.000 tués et 1000 chars détruits en dix jours de combat !).

– Pendant deux années, Staline a appelé les anglo-américains à ouvrir un deuxième front. En vain.

– Lorsqu’enfin l’Allemagne est vaincue, que les soviétiques foncent vers l’Oder, que la Résistance — souvent communiste – engage des révoltes insurrectionnelles un peu partout en Europe, la bannière étoilée débarque soudain en Normandie…

Nico Hirtt
Enseignant, écrivain (auteur de « L’école prosituée », ed Labor).

A propos Romain de Courcelles

militant communiste courcellois a/conseiller communal PCB et UCPW
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